
Dans la foulée du carnage de Pâques, une série d’attentats commis dans des églises et des hôtels qui ont fait au moins 290 morts, le gouvernement du Sri Lanka a décrété lundi l’entrée en vigueur de l’état d’urgence à partir de minuit au nom de la « sécurité publique ». L’enquête progresse : 24 suspects ont été arrêtés, tandis que le gouvernement évoque l’implication d’un réseau international.
L’état d’urgence a pour but de renforcer l’action des forces de sécurité en les dotant de pouvoirs spéciaux. « Ceci a été décidé dans le but d’autoriser la police et les trois forces [de l’armée] à assurer la sécurité publique », a déclaré la présidence de l’île d’Asie du Sud dans un communiqué.
L’état d’urgence accorde des pouvoirs élargis à la police et à l’armée. Par exemple, les autorités peuvent arrêter et interroger des suspects sans autorisation préalable de la justice.
Lundi, des soldats armés avaient été déployés devant les principaux hôtels de Colombo ainsi que devant le World Trade Centre, dans le quartier des affaires. Le gouvernement a bloqué l’accès aux réseaux sociaux et aux sites de messagerie comme Facebook et WhatsApp.
Colombo a également déclaré une journée de deuil national mardi. Le Sri Lanka n’avait pas connu un tel déchaînement de violence depuis la fin de la guerre civile il y a 10 ans.
De plus, 87 détonateurs de bombe ont été découverts dans une station d’autobus de Colombo, selon la police. « La police a trouvé 12 d’entre eux éparpillés sur le sol et plus tard fouillé une décharge où 75 détonateurs supplémentaires ont été trouvés », ont annoncé les forces de l’ordre dans un communiqué.
Une fourgonnette munie d’une bombe a explosé près d’une église pendant que les forces spéciales tentaient de la désactiver. On ignore pour le moment si cette déflagration a fait des victimes et où en étaient les équipes de déminage dans leur processus de désamorçage.
Les responsables des attaques
Un mouvement islamiste local, le National Thowheeth Jama’ath (NTJ), est à l’origine des attaques-suicides, a annoncé le porte-parole du gouvernement Rajitha Senaratne. Le mouvement aurait bénéficié de l’aide d’un réseau international, selon le gouvernement.
Les autorités sri-lankaises enquêtent sur de possibles liens entre l’organisation et des groupes étrangers. Le NTJ avait fait l’objet d’une alerte transmise aux services de police il y a 10 jours, selon laquelle le mouvement préparait des attentats contre des églises et l’ambassade de l’Inde à Colombo.
« Les informations des services de renseignement [montrent] que des organisations terroristes sont derrière des terroristes locaux. En conséquence, le président va demander l’assistance des pays étrangers », a annoncé un communiqué de la présidence.
D’après un porte-parole du gouvernement, ces attentats dont la responsabilité n’a pas encore été revendiquée ont été commis grâce à la collaboration d’un réseau international.
Nous ne pensons pas que ces attaques ont été commises par un groupe de personnes cantonnées à ce pays. Il y a un réseau international sans lequel ces attaques n’auraient pas pu réussir.
Selon les premiers détails de l’enquête policière, sept kamikazes ont pris part aux attaques dans des églises et des hôtels, a mentionné un enquêteur.
Deux kamikazes se sont fait exploser à l’hôtel Shangri-La, situé à Colombo, a déclaré Ariyananda Welianga, un haut responsable de la médecine légale du gouvernement sri-lankais. Les autres kamikazes ont visé trois églises et deux autres hôtels de la capitale, a-t-il ajouté.
Le premier ministre Ranil Wickremesinghe a déclaré qu’il mènerait une lutte acharnée contre le terrorisme.
« Pourquoi cela se produit-il? Nous devons examiner pourquoi des précautions adéquates n’ont pas été prises. Mais nous devons d’abord et avant tout veiller à ce que le terrorisme ne vive pas au Sri Lanka. Nous ne pouvons pas permettre cela. Nous sommes prêts à prendre toutes les mesures nécessaires pour que le terrorisme soit endigué et éradiqué au pays », a-t-il affirmé.
Un bilan revu à la hausse
Le bilan des attentats commis dimanche s’est alourdi au cours des dernières heures et est passé à 290 morts. Les attentats ont blessé 500 personnes, a annoncé la police lundi.
Les autorités précisent que 32 ressortissants étrangers – britanniques, américains, turcs, indiens, chinois, danois, néerlandais, français et portugais – figurent parmi les victimes.
« Certains corps sont mutilés et il est compliqué de les identifier », a affirmé à l’AFP un responsable des Affaires étrangères du Sri Lanka.
Le couvre-feu qui avait été imposé dimanche à la suite de l’attentat a été levé lundi. Toutefois, le président Maithripala Sirisena a déclaré l’état d’urgence dans l’ensemble du pays à partir de minuit lundi soir, a dit son bureau.
Un couvre-feu sera donc en vigueur dans la capitale de 20 h, heure locale, à 4 h.
Une bombe désamorcée près de l’aéroport
La police a également annoncé qu’elle avait désamorcé une bombe artisanale sur une route menant vers le principal terminal de l’aéroport de Colombo. Celui-ci reste ouvert, mais est sous haute sécurité.
Le président du Sri Lanka, Maithripala Sirisena, qui était en voyage à l’étranger au moment de la tragédie, a présidé aujourd’hui une réunion du Conseil national de sécurité à laquelle a participé le premier ministre Ranil Wickremesinghe.
Les attentats de dimanche ont été condamnés avec vigueur par plusieurs personnalités politiques dans le monde, allant du pape François au premier ministre canadien, Justin Trudeau, en passant par la première ministre britannique, Theresa May, et le président des États-Unis, Donald Trump.
Les Canadiens ayant besoin d’aide d’urgence doivent appeler les représentants officiels canadiens au +94 (11) 532-6232, a mentionné le haut-commissaire du Canada au Sri Lanka, David McKinnon, sur Twitter. Il invite également les citoyens canadiens sur place à informer leurs familles que « tout va bien pour [eux] ».
Affaires mondiales Canada a précisé qu’aucun Canadien ne serait pour l’instant concerné par les attaques terroristes survenues dans le pays.
Églises et hôtels ciblés
En quelques heures dimanche, huit bombes ont explosé dans quatre hôtels et trois églises du Sri Lanka, en pleine messe de Pâques.
Les lieux de culte visés ont été les églises catholiques de Saint-Anthony, à Colombo, et de Saint-Sébastien, à Negombo, une ville située au nord de la capitale, ainsi que l’église protestante de Zion, à Batticaloa, sur la côte orientale du Sri Lanka.
Quatre déflagrations ont été signalées dans des hôtels : le Shangri-La Colombo, le Kingsbury Hotel, le Cinnamon Grand Colombo et un hôtel de Dehiwela, une ville voisine de la capitale.
Enfin, une huitième explosion est survenue quelques heures plus tard, tuant trois membres des forces de l’ordre, alors qu’une perquisition de la police était en cours dans une maison de Colombo.
Le Sri Lanka, qui compte 21 millions d’habitants, recense 1,2 million de catholiques. Même s’ils sont peu nombreux – 70 % des habitants sont bouddhistes –, les catholiques sont perçus comme une force unificatrice, car on en trouve autant parmi les Tamouls que dans la majorité cinghalaise.
Certains chrétiens sont cependant mal vus parce qu’ils soutiennent des enquêtes externes sur les crimes de l’armée sri-lankaise contre les Tamouls pendant la guerre civile qui s’est achevée en 2009.
Selon les Nations unies, le conflit a fait entre 80 000 et 100 000 morts de 1972 à 2009.
En ce dimanche de Pâques, huit attaques ont été perpétrées contre des hôtels et des églises au Sri Lanka. Environ 290 personnes ont perdu la vie.
Ils se rendaient à la messe de Pâques, comme de nombreux catholiques de par le monde. Le Sri Lanka a été le théâtre ce dimanche d’attaques meurtrières perpétrées contre des hôtels et des églises. De nombreux morts sont à déplorer. Face à la menace terroriste, le gouvernement de ce pays insulaire situé au sud de l’Inde, dans l’océan Indien, a décrété un couvre-feu et le blocage temporaire des réseaux sociaux – afin d’éviter la propagation de fausses nouvelles. Les vols intérieurs ont par ailleurs été suspendus dans ce pays qui compte 1,2 million de catholiques romains et 270.000 chrétiens, selon un rapport de 2012 du département du recensement et des statistiques sri lankais.
Que s’est-il passé ?
Plusieurs explosions meurtrières sont survenues ce dimanche matin au Sri Lanka. A Colombo, la capitale, trois hôtels de luxe (Kingsbury, Shangri-La et Cinnamon Grand) ainsi que l’église Saint-Anthony ont été visés. Deux autres églises, localisées respectivement à Negombo (au nord de Colombo) et à Batticaloa (est de l’île) ont également été frappées.
Quelques heures plus tard, deux nouvelles explosions sont survenues. L’une a touché un hôtel de Dehiwala, banlieue sud de Colombo. Une autre s’est produite dans une maison d’Orugodawatta, banlieue nord de la capitale, où un kamikaze s’est fait exploser lors d’une opération policière.
Au Cinnamon Grand Hotel de Colombo, situé près de la résidence officielle du Premier ministre, un Sri-Lankais, qui s’était enregistré à l’hôtel la veille sous le nom de Mohamed Azzam Mohamed, a enclenché sa bombe dans la file de clients, venus profiter d’un buffet de Pâques dans un restaurant de l’établissement.
« Il était huit heures 30 du matin. Il y avait beaucoup de familles », a raconté à l’AFP un employé. « Il est allé au début de la queue et s’est fait sauter », a-t-il ajouté. « Un manager qui accueillait les clients fait partie de ceux qui ont été tués sur le coup […] C’était le chaos », précise-t-il.
À l’hôtel Shangri-La, situé à proximité, un photographe de l’AFP a constaté d’importants dégâts dans un restaurant au second étage : les vitres ont été soufflées, des fils électriques pendaient du plafond. Le ministre des Réformes économiques Harsha de Silva a fait état de « scènes horribles » à l’église Saint-Antoine et dans deux des hôtels visés où il s’est rendu. « J’ai vu des morceaux de corps éparpillés partout », a-t-il tweeté.
Gabriel, un chrétien sri-lankais d’une trentaine d’années, a eu son frère blessé dans l’attaque de l’église Saint-Sébastien de Negombo, localité située à une trentaine de kilomètres au nord de la capitale et surnommée « la petite Rome » pour ses nombreuses églises. « Mon frère était à la messe du matin, lorsque l’explosion s’est produite. Un bout du toit est tombé sur lui et il saignait abondamment de l’oreille », a-t-il raconté à l’AFP. Une vidéo prise dans l’une des églises touchées montrait de nombreux corps recroquevillés, le sol jonché de décombres et couvert de sang, les murs grêlés par les éclats. La violence de l’explosion a soufflé des parties du toit, laissant entrevoir le ciel.
Quel bilan ?
Depuis l’annonce du drame ce dimanche matin, le bilan n’a eu de cesse de s’aggraver. On dénombre pour l’heure « autour de 290 morts », selon une source policière citée par l’AFP. Parmi les victimes, autour de 37 étrangers, dont 11 ont pu être identifiés. « Certains des corps sont mutilés et il est compliqué de les identifier », a déclaré à l’AFP un responsable.
Affaires étrangères. « Il y a beaucoup de personnes blessées dont certaines dans un état critique », a ajouté cette source. Lors du dernier bilan effectué par la police, on comptait environ 500 blessés.
Le ministre des Affaires étrangères néerlandais a confirmé qu’un de ses ressortissants figurait parmi les victimes, une femme de 54 ans. L’agence de presse Lusa révèle qu’un Portugais serait aussi mort dans ces attaques. L’agence de presse turque Anadolu indique que deux de ses ressortissants sont également décédés.
James Dauris, haut commissaire britannique et ambassadeur aux Maldives, précise qu’il s’est entretenu avec des victimes britanniques blessées dans l’explosion. Selon le ministère sri-lankais des Affaires étrangères, trois Britanniques et deux personnes détenant la double nationalité britannique et américaine ont été tués dans les explosions. Ce que confirme Londres, sans préciser le nombre. « Nous pouvons confirmer que des ressortissants britanniques figurent parmi ceux qui ont été tués dans les horribles attentats perpétrés aujourd’hui au Sri Lanka », a déclaré un porte-parole du Foreign Office dans un courrier électronique à l’AFP.
Les médias chinois évoquent la mort de deux de leur ressortissants et la ministre des Affaires étrangères indienne précise que trois Indiens sont morts. Mike Pompéo a annoncé, ce dimanche en fin d’après-midi que « plusieurs » américains avaient été tués lors de ces attentats et le ministre des affaires étrangères danois évoque trois de ses ressortissants tués.
Sait-on qui a commandité ces attaques en série ?
Aucune revendication n’a été communiquée ce dimanche après-midi. Le Premier ministre sri lankais Ranil Wickremesinghe a déploré dimanche des « attaques lâches ». Toutefois, selon les premiers éléments de l’enquête, le mouvement islamiste NTJ (National Thowheeth Jama’ath) pourrait en être à l’origine.
Il y a dix jours, le chef de la police nationale, Pujuth Jayasundara, avait donné l’alerte en affirmant que le NTJ projetait « des attentats suicides contre des églises importantes et la Haute commission indienne ». Huit personnes ont été arrêtées en lien avec la vague d’attaques, a annoncé d’abord le Premier ministre. Plus tard, la police a parlé de treize hommes interpellés, appartenant tous au même groupe radical, puis de 24 personnes arrêtées.
Le NTJ (National Thowheeth Jama’ath) s’était fait connaître l’an passé en lien avec des actes de vandalisme commis contre des statues bouddhistes. « Nous devons aussi examiner les raisons pour lesquelles les précautions adéquates n’ont pas été prises », a dit le Premier ministre. Il a ajouté que la première des priorités du gouvernement était d' »appréhender les terroristes ». « Avant toute chose nous devons nous assurer que le terrorisme ne se manifeste pas au Sri Lanka », a-t-il dit.
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