RDC : Pourquoi les investissements dans l’agriculture ne viennent pas

Assistant avec une importante délégation, cette semaine, au premier forum Russie-Afrique, à Sotchi, le président congolais Félix Tshisekedi a appelé les Russes à investir dans son pays. Il a souligné que « le modèle de développement durable que j’ai choisi consacre le primat de l’agriculture sur les mines », alors que le président Vladimir Poutine a indiqué son intérêt pour ces dernières.

Le président congolais dit en effet que l’agriculture est une « priorité » de son gouvernement – comme l’affirmait son prédecesseur, Joseph Kabila. Mais le Congo reste le second pays au monde après le Brésil pour la quantité de terres cultivables encore en friche (seuls 10% des terres arables y sont cultivées) et la majorité de la population n’y mange pas à sa faim.

Car, depuis Mobutu, les autorités politiques congolaises continuent à se contenter de déclarations, jamais suivies d’actions. Même déclarée « prioritaire », l’agriculture n’a jamais reçu plus que 2% du budget national, dont la moitié seulement était effectivement déboursée; sur cette somme, quelque 80% sert à payer les salaires des fonctionnaires de l’agriculture, sans effet sur la production des paysans.

Ceux-ci sont découragés de produire plus que les besoins de leur famille par les ponctions opérées sur leurs récoltes par les divers corps armés sévissant sur les routes. Ils manquent de ressources pour engraisser leur terres et varier les plants. L’Etat a laissé tomber depuis longtemps la production de variétés adaptées aux conditions locales.

Bien sûr, un développement important de l’agriculture pourrait venir de l’agro-industrie. Mais les Congolais qui se sont enrichis répugnent à y investir, parce que l’immobilier rapporte plus.

Et les investisseurs étrangers – comme les Russes appelés aujourd’hui à la rescousse – sont refroidis par la Loi agricole de 2011, qui exige que toutes les entreprises agricoles appartiennent majoritairement à l’Etat congolais ou à des citoyens congolais. Depuis lors, les étrangers n’investissent plus dans un projet agricole au Congo.

En novembre 2014, déjà, le ministre congolais de l’Agriculture de l’époque, Jean-Chrysostome Vahamwiti, nous assurait : « Nous avons gelé ces dispositions en attendant qu’un projet d’amendement soit adopté« . Cinq ans plus tard, l’amendement n’existe toujours pas et la Loi agricole  continue à empêcher de facto les investissements étrangers. Car qui irait placer son argent dans une entreprise agricole dont un autre que l’investisseur principal serait patron, dans un pays qui a derrière lui la catastrophique expérience de la zaïrianisation (nationalisation des entreprises étrangères) et n’en a pas tiré de leçon?

Le président Tshisekedi, on le sait, n’a pas assez d’argent pour faire tout ce qu’il voudrait pour le Congo. Voici une action qui ne coûte pas cher: enfin produire cet amendement à la Loi agricole.

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