RDC: mise au point du ministère de la Santé

Le Ministère de la Santé est étonné du soudain intérêt de Mme Marie-France Cros pour l’épidémie d’Ebola dans les provinces du Nord-Kivu et de l’Ituri en République Démocratique du Congo. Alors que cette épidémie sévit depuis plus de dix mois, Mme Cros n’a écrit que deux articles sur le sujet à deux semaines d’intervalle dans lesquels elle met en lumière une ignorance totale des réalités du terrain.

Le dernier article intitulé « RDCongo : Ebola: une partie des soignants impayés depuis plusieurs mois » contient tellement de rumeurs et de contre-vérités qu’il semble évident que son auteur ne parvient pas à faire une distinction entre le mythe et la réalité.

A travers ses nombreuses accusations et attaques personnelles sans fondement à l’encontre du ministre de la Santé de la RDC, l’auteur peine à dissimuler son intention de nuire à la réputation du ministre et des efforts du Gouvernement dans le cadre de la riposte contre Ebola. Tous les amalgames et raccourcis analytiques sont bons pour atteindre cet objectif.

Il y a lieu de rappeler que l’épidémie actuelle d’Ebola a été aggravée par la violence causée par la désinformation et l’instrumentalisation de certaines couches de la population. L’auteur de cet article s’engage délibérément dans la désinformation tout en incitant au tribalisme et à la haine ethnique. Dans un contexte où les conflits ethniques en RDC prennent de l’ampleur, cette attitude inconsciente est condamnable car elle met en danger tous les médecins de la riposte non-originaires du Nord-Kivu et de l’Ituri.

Bien que vous ayez démontré le peu d’intérêt que vous accordiez à la vérité, le ministère de la Santé se permet d’apporter les clarifications suivantes.

« A cela s’ajouter le fait que le ministre sortant de la Santé, Oly Ilunga Kalenga, a amené à Kinshasa des équipes de lutte contre Ebola, formées principalement de membres de sa tribu, originaire du Kasaï (centre du Congo), à Goma, Beni et Butembo. »

Le même auteur a publié ces propos dans son précédent article intitulé « Ebola est devenue une seconde Opération Turquoise au Nord-Kivu », publié le 5 juin 2019 dans la Libre Belgique. Visiblement, l’auteur n’était pas au courant que la classification de la population par ‘ethnie’ ou ‘tribu’ qui prévalait durant l’époque coloniale a pris fin en même temps que la colonisation. Ainsi, au risque de la décevoir, le ministère de la Santé ne possède pas de liste qui précise l’origine ethnique de ses agents. Toutefois, nous pouvons affirmer que, parmi les coordonnateurs du ministère de la Santé en charge des différentes zones de santé affectées et qui composent leurs équipes à leur guise, aucun ne provient du Kasaï. Kasaï qui, pour votre information, n’est pas la province d’origine du ministre de la Santé.

« Le ministère de la Santé ne paie pas »

Les fonds que la Banque mondiale mis à la disposition du gouvernement pour l’épidémie d’Ebola sont en effet gérés par le Projet de Développement du Système de Santé (PDSS) qui dispose de mécanismes de supervision fiduciaire renforcés indépendantes. En effet, tout programme du gouvernement financé par la Banque mondiale répond à des procédures de gestion fiduciaire spécifiques mises en place par la Banque mondiale qui doivent être respectées par le Gouvernement. Contrairement aux autres programmes du ministère, les membres de l’équipe de coordination du PDSS ne sont pas nommés par le ministre mais recrutés sur base d’appels à candidature publics suivant les règles de passation de marchés de la Banque mondiale. A ce jour, le PDSS a payé en moyenne 1.000 agents de la riposte (prestataires de services) par mois pour les périodes de aout 2018 à avril 2019. Les agents non payés par le PDSS sont des agents qui ont été généralement contractualisés par un des partenaires responsables pour un des piliers de la riposte et qui, de ce fait, ne sont pas éligibles pour un deuxième paiement par le PDSS pour les mêmes fonctions. Par ailleurs, certaines grèves ayant eu lieu ces dernières semaines étaient liés aux retards de paiement de certains de ces partenaires et non du PDSS.

Ordre de mission et baisse des effectifs

D’un point de vue administratif, les ordres de mission ne peuvent être signés que par le ministre de la Santé lui-même ou le ministre faisant son intérim en cas de déplacement. Aucun autre agent du ministère n’a l’autorité de signer des ordres de mission dans le cadre de la riposte contre Ebola, tel qu’exigé par les procédures mises en place par le Banque mondiale. Le ministre n’a jamais dit que la maladie serait éradiquée en juillet. D’un point de vue purement scientifique, le ministre ne parle jamais d’éradication du virus Ebola car cela implique la destruction définitive du vecteur de ce virus ce qui est impossible à ce jour. Les agents expérimentés du ministère de la santé parlent plutôt de ‘mettre fin à l’épidémie’ ou briser la ‘chaîne de transmission’ car ils savent que le virus Ebola ne sera jamais éradiqué et continuera à circuler dans la forêt Équatoriale. Il y a ainsi lieu de se poser des questions sur la crédibilité de la source de Mme Cros qui prétend être un médecin de la riposte.

Le ministre Ilunga lapidé

Dans son dernier paragraphe, l’auteur a fait preuve d’une imagination débordante. La voiture du ministre n’a jamais été lapidée. En rentrant d’une activité de sensibilisation à Aloya, dans la zone de santé de Mabalako, le convoi dans lequel se trouvaient le ministre et l’OMS a croisé un cortège de motards qui faisait route en sens inverse pour participer à un enterrement. Malheureusement, comme à leur habitude depuis plusieurs mois, certains jeunes ont jeté des pierres sur les véhicules de la riposte sans savoir qui se trouvait dans le convoi.

L’entièreté de cet article est basé sur les dires d’une seule source présumée du ministère de la Santé dont les dires n’ont même pas été vérifiés ni par l’auteur ni par ses éditeurs. Le nombre d’erreurs factuelles contenues dans cet article est déroutant, pour ne pas dire hallucinant. Tel que vous pouvez le constater, littéralement chaque paragraphe de cet article contient des informations fausses.

La crédibilité de La Libre Congo a déjà été entamée il y a très longtemps en raison du manque d’objectivité et de base factuelle de ses articles de manière générale. Ce dernier article de Mme Cros ne fait que confirmer que La Libre Congo n’est, au final, qu’un blog de personnes qui méprisent les normes et valeurs du métier de journaliste. Tintin au Congo n’est plus d’actualités. En 2019, près de 60 ans après l’indépendance de la RDC, il serait temps que Mme Cros et La Libre comprennent qu’un média en ligne n’est pas supposé être un carnet de voyages dans lequel des nostalgiques de la colonisation partagent leur récit imaginaire teinté de racisme et d’ignorance.

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