
Environ quatre-vingts journalistes de Télé 50, une chaine de télévision privée émettant à partir de Kinshasa, ont été relâchés mercredi 10 avril, après avoir été interpellés par la police et conduits au Parquet général de Kinshasa. Eric Lukoki, membre du comité syndical provisoire de Télé 50, explique que les journalistes manifestaient contre l’ordre donné par leur directeur général Jean-Marie Kasamba, leur interdisant l’accès aux locaux de cette entreprise audiovisuelle.
« Ce qui s’est passé hier, c’est la suite logique de ce que nous avons entamé lundi 8 avril. On nous interdit d’accéder aux locaux de Télé 50 », relate Eric Lukoki.
Autre grief contre Jean-Marie Kasamba : son refus de mettre en place un syndicat au sein de l’entreprise Télé 50.
« Nous avons désavoué notre directeur général parce qu’il ne veut pas l’installation d’un syndicat », affirme Eric Lukoki.
Dans sa relation des faits, il fait savoir que la Police nationale congolaise (PNC) est venue avec l’ordre d’arrêter une dizaine de journalistes, notamment Caddie Kulab, Matthieu Kamango ou encore Jolie Diyoka.
C’est par solidarité que tous les autres, présents sur le lieu, ont été embarqués. Dans l’ensemble, c’était environ 80 journalistes, dit-il.
« La police aurait dû nous amener dans leurs locaux pour établir le procès-verbal, identifier ceux qui ont été interpellés. Vers 19h, on nous a demandé de rentrer, parce qu’on ne pouvait pas nous retenir. Celui qui nous accusait ne pouvait pas se présenter », raconte Eric Lukoki.
Procédures non respectées
Pour sa part, le Directeur général de Télé 50, Jean-Marie Kasamba réfute toutes ces accusations. Il estime que ses collaborateurs n’ont pas respecté la procédure.
« Les arriérés ont été réglés intégralement, y compris même le mois de février. Un syndicat suit une procédure. Les collaborateurs d’une société privée, ne peuvent pas demander à leur directeur général, responsable de la société de laisser cette société à leur disposition », se défend M. Kassamba
Il dit être prêt à recevoir ses employés pour écouter à nouveau leurs doléances.
« Je ne peux pas vouloir du mal de mes propres journalistes, que j’ai recrutés, formés pendant 10 ans, et que j’ai payés. Je suis prêt à les recevoir », affirme Jean-Marie Kasamba.
Il déconseille par ailleurs à ces journalistes de « continuer à trouver l’ordre public ».
« La police leur a demandé s’ils avaient l’autorisation de la ville. Ils sont partis au parquet. Comme il y avait des « shégués » [parmi eux] ou enfants de la rue, on leur a demandé de retourner à la maison. Ceux qui sont interpellés à la justice, doivent se justifier à la justice. Les autres doivent attendre la décision de leur hiérarchie », recommande Jean-Marie Kasamba.
Des journalistes d’une chaîne de télévision privée proche de l’ex-président congolais Joseph Kabila, accusés de « tapage diurne », ont été interpellés mercredi à Kinshasa et détenus au parquet pendant plusieurs heures, a-t-on appris jeudi de sources concordantes. Présents devant les installations de la chaine où des bureaux sont fermés depuis le 6 avril, « nous avons vu venir un colonel de la police qui nous a demandé d’évacuer », a affirmé le rédacteur en chef et présentateur vedette de Télé 50, Pathy Nkieri, à l’AFP.
Face à la résistance du groupe, l’officier a utilisé du « gaz lacrymogène pour nous disperser (…) avant d’embarquer des journalistes dans une jeep de la police, jusqu’au parquet » de la Gombe, a-t-il expliqué.
Au parquet, un mandat visant au moins huit journalistes dont M. Nkieri a été présenté mais « nous avons exigé la présence de notre avocat avant d’être entendus (…), finalement nous sommes sortis de là le soir sans trop savoir qui était le plaignant et ce qu’on nous reprochait », a-t-il ajouté.
« Les forces de l’ordre ont exécuté les mandats d’amener établis par le parquet général de la Gombe », pour des « actes de vandalisme » et du « tapage diurne », a expliqué le porte-parole de la police kinoise, le colonel Pierrot-Rombaut Mwanamputu, à l’AFP.
Au début de l’année, les journalistes de Télé 50 réclamaient entre 11 et 14 mois d’arriérés de salaire qui ont finalement été payés après un mouvement de grève.
La situation reste cependant tendue entre les salariés et le directeur général de Télé 50, Jean-Marie Kassamba. Pour ce dernier, les salariés arrêtés par la police réclamaient son départ de la tête de cette chaîne d’information.
« C’est mon entreprise, ce sont mes employés, mes collaborateurs, s’ils ont des revendications, je suis prêt à les écouter », mais « les choses ne peuvent pas se faire dans l’anarchie », a-t-il insisté.
L’un des principaux actionnaires de Télé 50 est Moïse Ekanga, un proche de l’ex-président congolais Joseph Kabila, au pouvoir depuis 2001 jusqu’au début de l’année 2019, lorsque l’opposant Félix Tshisekedi lui a succédé.
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